Durant trois ans, Mélanie Lefebvre a été entrepreneure salariée au sein de la CAE Le Groop à Dunkerque. Alors qu’elle vient de bifurquer vers le poste de responsable de La Turbine – Place des entrepreneurs, elle revient sur cette expérience ô combien enrichissante !
Avant, Mélanie était responsable de la communication dans un club de sport professionnel. Heureuse à ce poste, elle a pourtant ressenti le besoin d’un nouveau départ après une quinzaine d’années. En ligne de mire, l’envie de chercher un moyen de concilier vie professionnelle et activités artistiques.
Membre de la CAE Le Groop depuis 2022, la dunkerquoise de cœur développe une activité de rédactrice web et de conseil en communication… tout en vivant autrement l’esprit d’équipe dont elle se revendique. Au cours de l’été 2024, une opportunité inattendue se présente à elle et l’amène à se repositionner dans l’univers de l’entrepreneuriat.
Retour sur un parcours professionnel inspirant et sur sa vision des multiples avantages à entreprendre en CAE !
Étudiante partie chercher son chemin sur le littoral
Mélanie a grandi à Armentières, dans la métropole lilloise. Un peu à contre-courant du flux des étudiant·es qui débarquent chaque année à Lille, elle décide après son bac d’aller à Dunkerque pour entamer ses études supérieures en langues étrangères appliquées. Comme le confie Mélanie : « À cette époque-là, je n’avais absolument aucune vocation. Je ne savais pas du tout dans quoi j’avais envie de travailler ». L’installation à Dunkerque est positive : « Je suis vraiment tombée en amour avec Dunkerque et depuis, je n’ai plus voulu quitter cette ville ! ».
Après un bref éloignement pour suivre un Master en management international à l’IAE de Valenciennes, Mélanie décide de faire son stage de fin d’études à l’USDK, le club de handball professionnel de Dunkerque. On est en 2004 et le club, véritable fierté locale, évolue alors en première division de la ligue nationale de handball professionnel qui vient de se créer. À l’USDK une petite équipe polyvalente et motivée est à l’œuvre, en lien direct avec les joueurs. Cette équipe deviendra vite « une seconde famille » pour Mélanie.
« Je suis vraiment tombée en amour avec Dunkerque et depuis, je n’ai plus voulu quitter cette ville ! «
Apprentissage d’un métier-passion
Mélanie, accueillie en tant qu’assistante marketing et commerciale pour ce stage, réalise des missions riches et variées qui lui permettent de clarifier ses préférences : « Je me suis vite rendue compte que le commercial pur n’était pas forcément mon point fort. Je préférais l’événementiel. Et puis à un moment il y a eu un site Internet. C’était vraiment les balbutiements, mais on m’en a confié la gestion. Ça a été très formateur ! ».
L’investissement est réel pour suivre la vie de l’équipe et le calendrier des matchs, soirs et week-ends compris : « Clairement, tu ne comptes pas tes heures. Je me suis vraiment passionnée pour le handball alors qu’au départ rien ne me prédestinait à travailler dans le domaine du sport… ». À la fin du stage, l’embauche de Mélanie au poste d’assistante marketing et communication apparaît comme une évidence pour les deux parties.
Contribuer au développement du handball professionnel
Mélanie résume ses années à l’USDK avec exaltation : « J’ai eu beaucoup de chance d’être à cet endroit-là à ce moment-là : le handball était en train de se professionnaliser. C’était top de voir cette évolution de l’intérieur et de participer, à mon échelle, au développement du handball français ». En 2008, l’équipe se restructure et Mélanie devient responsable de la communication. À ce poste, elle apprend sur le tas et accompagne les évolutions numériques, notamment l’arrivée des réseaux sociaux. Pendant ce temps, le Club enchaîne les titres prestigieux et connaît une apogée en 2014 avec le titre de Champion de France.
Au cours de cette expérience, Mélanie est inspirée par l’esprit d’équipe du sport collectif ainsi que par le contact avec les bénévoles passionnés qui prêtent main forte au club les soirs de match : « Pour moi ça a été un vrai enrichissement sur le plan humain. J’en garde d’excellents souvenirs ! ».
Quand l’envie d’autre chose s’immisce…
Pourtant, après une quinzaine d’années, Mélanie ressent le besoin de découvrir autre chose, de vivre « d’autres aventures professionnelles ». Après des années à prioriser son métier, Mélanie vit un tournant intérieur : « J’ai réalisé à un moment que mon job me prenait beaucoup de temps et laissait peu de place aux choses plus personnelles. J’ai commencé à me dire que je risquais peut-être de passer à côté de certaines choses importantes pour moi… ». Mélanie pose alors ce constat : elle souhaite travailler autrement et donner plus de place à ses activités extra-professionnelles. En effet, Mélanie est aussi chanteuse. Et elle a soif de pouvoir développer ses projets artistiques.
« J’ai réalisé à un moment que mon job me prenait beaucoup de temps et laissait peu de place aux choses plus personnelles. »
Quitter un CDI : un grand saut sans parachute ?
Malgré la prise de conscience, le processus du changement a pris un certain temps à se décanter tandis que les saisons sportives s’enchaînaient. Mélanie se sent bien dans son emploi, apprécie beaucoup ses collègues : pourquoi tout chambouler ?
Avec le recul, elle confie aujourd’hui : « Je suis un peu une flippée, à la base. Enfin, pour être plus précise je dirais que l’on m’a appris à avoir peur du lendemain, peur de manquer. Donc quitter un CDI !? Mais pourquoi faire ? Pour moi c’était comme sauter dans le vide sans parachute, ce n’était pas possible. D’autant plus que je ne savais pas ce que j’avais envie de faire et que je n’avais pas forcément le temps d’y réfléchir… ».
À un moment pourtant, le déclic est venu : « J’ai ressenti qu’il fallait que je parte, que j’étais vraiment arrivée au bout du chemin. Je n’étais pas malheureuse, mais je sentais que je risquais de le devenir. ». La clé de ce déclic sera sans doute un regain de confiance en soi : « Dans ma tête, il y a un truc qui s’est passé : je me suis rendue compte que le parachute en fait, c’était moi-même ! Que j’avais de la force et qu’il ne tenait qu’à moi de faire en sorte que tout se passe bien ».
De déconvenues en découvertes
Mars 2020 : Mélanie négocie une rupture conventionnelle. Deux semaines plus tard, la France entre en confinement. Tous les projets artistiques auxquels Mélanie se réjouissait de pouvoir enfin se consacrer se retrouvent bloqués. « C’est tout moi ça, je choisis toujours bien mes moments ! », plaisante Mélanie. Il a donc fallu s’adapter aux aléas, changer son fusil d’épaule. Mais « le parachute » s’est déployé…
Au cours de cette période, l’idée lui vient de se lancer en indépendante dans la communication et en particulier dans la rédaction web SEO. Ce type de rédaction inclut des savoir-faire d’optimisation pour une meilleure reconnaissance des contenus des pages web par les moteurs de recherche. Mélanie, déjà rôdée à la rédaction, s’inscrit donc à une formation en ligne pour renforcer cet aspect plus technique.
Au détour d’une discussion entre ami·es : le Groop !
Lorsqu’elle évoque le projet de se mettre à son compte, des ami·es avec qui elle échange, déjà entrepreneur·es au sein du Groop, la CAE du littoral, lui expliquent le fonctionnement d’une CAE. Pour Mélanie, c’est une véritable découverte : « Vraiment j’ai débarqué ! C’est un truc que j’ai complètement découvert, le statut d’entrepreneur·e-salarié·e, et qui m’a tout de suite intéressée : l’accompagnement, le parcours sécurisé, mais aussi le collectif, le fait de ne pas être seule… ».
Mélanie se reconnaît immédiatement dans ce type d’organisation : « Tout ça résonnait vraiment avec mon parcours : moi qui ai travaillé dans une équipe, pour une équipe, pendant des années. Pour moi le travail est un sport collectif ! »
« C’est un truc que j’ai complètement découvert et qui m’a tout de suite intéressée : l’accompagnement, le parcours sécurisé, mais aussi le collectif, le fait de ne pas être seule… «
La CAE : une vraie bonne solution pour entreprendre
En juin 2022, Mélanie lance donc son activité directement au sein du Groop en contrat CAPE, sans passer par la case micro-entreprise. Mélanie développe sa propre marque, du nom de Storyt/elle. À travers ce choix, Mélanie raconte avoir effectivement trouvé les avantages qu’elle avait entrevus en découvrant le modèle des CAE.
En premier lieu, il y a le fait de reprendre la main sur son emploi du temps et son agenda, et donc de laisser davantage de place à ses activités artistiques.
Ensuite, Mélanie confirme son intérêt pour les échanges entre pairs qui favorisent le développement des compétences entrepreneuriales et le sentiment de légitimité : « J’ai aimé le fait de trouver des entrepreneur·es qui avaient les mêmes problématiques que moi, même si on ne développe pas forcément les mêmes activités. C’est essentiel de pouvoir s’appuyer sur d’autres entrepreneur·es qui passent par les mêmes phases que toi : les questionnements, les doutes, le syndrome de l’imposteur… Ensemble on se sent quand même un peu plus fort·es ! ».
S’investir dans et pour le collectif
Très vite Mélanie n’hésite pas à s’investir bénévolement pour faire rayonner la communication de la CAE, pour animer les permanences bimensuelles du coworking proposées aux entrepreneur·es, ou encore pour organiser la journée Hauts les Coop ! de Dunkerque en avril 2023 : « Pour moi c’est naturel de m’investir dans la structure sur la base de mes compétences et de mes appétences. »
Le troisième attrait essentiel de la CAE pour Mélanie est la possibilité, tout en restant indépendante, de développer des projets en commun avec d’autres entrepreneur·es. Elle explique : « Il y a plus d’idées dans plusieurs têtes que dans une seule, et puis les autres te permettent aussi de prendre de la hauteur quand tu as la tête dans le guidon. Avoir d’autres points de vue, c’est super enrichissant ».
Repérer et répondre aux nouveaux besoins du territoire
Mais au-delà des échanges, il y a les possibilités concrètes de coopération ! Depuis quelques mois, Mélanie développe une nouvelle activité avec Natacha, psychologue du travail et consultante RH, également membre de sa CAE.
« En discutant de ça, on s’est dit qu’il y avait vraiment quelque chose à faire… »
Tout aurait commencé par une discussion informelle sur les évolutions du territoire qui accueille actuellement de nouvelles entreprises de taille importante. Génératrices de milliers d’emploi, ces entreprises viennent bouleverser le marché du travail local. Mélanie relate : « En discutant de ça, on s’est dit qu’il y avait vraiment quelque chose à faire sur la marque employeur, qui est à la jonction des RH et de la communication ». Il existe en effet un double enjeu fort pour les entreprises : fidéliser les collaborateur·ices existant·es et recruter de nouvelles personnes.
Fortes de cette analyse, Mélanie et Natacha ont développé un service d’accompagnement personnalisé pour les entreprises souhaitant travailler à l’attractivité de leur marque employeur. Leur offre, présentée au printemps 2023, a rapidement trouvé écho sur le territoire visé, et même au-delà.
Après un an en CAE : objectif CÉSA atteint !
Un an après son entrée au sein du Groop, Mélanie peut se féliciter d’avoir atteint l’objectif qu’elle s’était donné : celui de devenir entrepreneure-salariée via le contrat CESA proposé par la CAE. Cela signifie que la période « test » de son activité, via le contrat CAPE, s’est avérée concluante et qu’il lui est possible de vivre de ses prestations.
Elle commente ce succès avec le mélange d’enthousiasme et de prudence qui la caractérise : « Je suis très contente ! Même si encore une fois, je sais aussi que ne suis pas encore sortie de l’auberge ! On dit qu’il faut au moins deux ou trois ans pour avoir une activité pérenne… »
Si Mélanie admet traverser encore quelques « montagnes russes », elle n’a aucun regret d’avoir fait l’expérience du grand saut dans l’entrepreneuriat : « Je pense que ça apprend beaucoup sur soi d’être entrepreneur·e. Si demain je devais retourner au salariat classique dans une entreprise, j’aurais gagné tellement en compétences, et en force, que ça resterait positif ! J’aime à penser que quand tu as connu l’entrepreneuriat, il n’y a pas de montagne que tu ne puisses franchir ».
Saisir une nouvelle opportunité grâce au réseau de la coopérative
Mélanie ne croyait pas si bien dire ! Quelques mois après l’entretien qui a nourri cet article, elle m’apprend qu’il y a du nouveau pour elle. En effet, une personne de sa CAE lui a récemment transféré une offre de poste en lui indiquant qu’elle avait le profil recherché. Et cette personne ne s’était pas trompée puisque Mélanie vient d’être recrutée !
À compter de septembre 2024, elle devient responsable de La Turbine, la place des entrepreneurs de Dunkerque ! Porté par la CUD (Communauté Urbaine de Dunkerque), cet espace réunit les différentes structures qui œuvrent dans l’accompagnement à la création ou à la reprise d’entreprises… dont la CAE Le Groop.
« Au départ, explique Mélanie, j’ai hésité parce que je n’avais pas prévu de retourner vers le salariat. Mais ce n’est pas parce que l’on tente l’entrepreneuriat que l’on est obligé d’y rester ! En regardant la fiche de poste, je me suis enthousiasmée pour les missions proposées. En fait, ma mission consiste principalement à faire coopérer les différentes structures réunies au sein de La Turbine et à animer les réseaux d’entrepreneur.es et d’entreprises. On est encore une fois dans le travail d’équipe ! », se réjouit Mélanie.
Continuer à servir le développement local de l’entrepreneuriat
Si Mélanie quitte donc la CAE – la souplesse du modèle ayant aussi l’avantage de rendre fluide la possibilité du retour à l’emploi classique – elle ne perçoit pas cette prise de poste comme un départ. Pour elle, il s’agit davantage d’une continuité dans son parcours, d’une autre manière de rester au service du dynamisme de ce territoire qu’elle aime tant.
« Ce n’est pas parce que l’on tente l’entrepreneuriat que l’on est obligé d’y rester ! »
Elle commente : « Finalement, je réalise que ce qui m’a le plus intéressée dans mes années en CAE, ce n’est pas tant mon activité en communication que l’entrepreneuriat en tant que tel ! Cela m’a appris à être plus ouverte et attentive aux opportunités. Aujourd’hui j’ai envie de transmettre cet optimisme à d’autres personnes qui se lancent ». Tout en continuant à cultiver, en soirée, sa passion pour la musique !
Gageons que dans le cadre de ses nouvelles fonctions, Mélanie saura faire fructifier autrement la richesse de ce passage par l’expérience CAE.